Conditionnement et rangement
En septembre 1722, les archives sont rangées dans le bureau de l’hôtel-Dieu (dans le plan qui figure dans l'ouvrage de Tenon, un local attenant au bureau leur est réservé). Elles sont enfermées à clef dans une armoire en chêne vernie, à deux guichets. Le 14 janvier 1790, tous les titres et papiers y sont placés, et le 7 décembre, l'inventaire et les brouillons. Les pièces sont regroupées en liasses dans des chemises sur lesquelles figurent l'indication de la série, l'intitulé de la liasse, le numéro de la liasse et le nombre de pièces. Une ficelle relie les pièces à la chemise. De même, les liasses d'une série sont rassemblées dans une chemise sur laquelle sont indiqués la série et le nombre de liasses. Au bas de ces chemises figure une petite languette en papier, collée, sur laquelle est mentionnée la série. En 1808, les archives se trouvent toujours dans une armoire fermée avec trois clefs, détenues chacune par une personne différente. À la fin du dix-huitième siècle, les baux, cependant, semblent être restés entre les mains des deux hommes qui les ont classés, Béville et Guilbert. En 1993, les ficelles qui les relient en petites chemises sont encore intactes. De même, le 6 septembre 1791, Guilbert a retiré les liasses de la cote AA du bureau de l’hôtel-Dieu. Aujourd'hui, une partie est en déficit.
D’autres documents ont sans doute été conservés dans le chartrier de l'abbaye : les comptes (ceux conservés aujourd’hui étaient des exemplaires destinés à l'abbaye), mais aussi les papiers de la fondation des filles à marier. Les chemises de leur inventaire portent en effet des indications d'un système de cotation retrouvé sur d'autres chemises provenant du chartrier de l'abbaye. Les papiers étaient rangés dans trois boîtes posées sur des tablettes. La cotation est boîte 1ère (ou 2e ou 3e), planche 3e, tablette A. Enfin, certains documents, comme les pièces du conflit entre l’hôtel-Dieu et les échevins, ont été conservés aux archives communales.
La Révolution française provoque plusieurs bouleversements. Les documents gardés dans le chartrier de l’abbaye intègrent à leur tour les archives communales. De même, plusieurs séries sont retirées des archives de l’hôtel-Dieu en raison des lois du 9 brumaire An II et 3 frimaire An II. Ainsi, la série C, dîmes de Rebets, et la série D, redevances en grains sur les dîmes d'Aubervilliers, sont remises au directoire du district de Franciade (Saint-Denis) ; la série J, fief de la maladrerie de Fontenay, à la maison commune de Franciade ; la série AD, rentes sur le roi et autres assignats publics, aux receveurs des rentes à Paris pour inscription au grand livre de la dette, le 24 août 1793. Par la suite, tous ces documents, sauf la série AD, sont remis à l'administration municipale du canton de Franciade par l'administration du district de Franciade (loi du 21 fructidor an III).
Au début du vingtième siècle, une partie des archives de l’hôtel-Dieu identifiées se trouve aux Archives municipales (qui partagent avec une bibliothèque de nouveaux locaux construits à l'emplacement de l'ancien hôtel-Dieu), une autre à l’hôpital et une dernière au bureau de bienfaisance. En 1926, la commission administrative de l’hôpital décide de verser les archives anciennes et révolutionnaires qu’elle conserve aux Archives municipales. En 1927, les documents sont estampillés mais le rapport d'activité indique que ne présentant plus aucune trace de classement, ils « ont fait l'objet d'un premier triage et [été] mis provisoirement en cartons avant leur classement définitif » qui n’a semble-t-il pas eu lieu avant 1993. L’hôpital a ensuite procédé à de nouveaux versements en novembre 1933, août 1942, et pour les archives modernes le 25 février 1943. En mars 1931, un employé de l’hôpital a aussi remis aux Archives municipales des pièces recueillies, vers 1920, parmi de « vieux papiers » destinés au pilon. Mais pour certains documents, aucune indication n’a pu être retrouvée au sujet de leur entrée aux Archives municipales.
En 1993, les archives de l’hôtel-Dieu y sont dispersées dans 12 cartons cotés de HD 1 à HD 12 (décrits dans un inventaire sommaire), mais aussi une quinzaine d’autres cartons où elles ont été repérées grâce à un récolement récent, et enfin dans 6 cartons de vrac où elles sont mélangées à d’autres pièces sans aucun rapport. Pourtant, entre 1665 et 1993, elles ont déjà fait l'objet de différents inventaires.
Classement et description
Trois répertoires numériques ont d’abord été réalisés en 1665, 1679 et 1770. Un grand nombre de documents semble s’y retrouver de l’un à l’autre, et ils se bornent à indiquer l'objet de chaque article et sa date. L'inventaire de 1665 comporte une cotation numérique, de 1 à 71. L'intitulé des pièces, assez développé, est suivi de la mention : inventoriée par un I, par deux H, ... Ces chiffres romains sont reportés sur le dos des pièces. Le répertoire de 1679, réalisé après la révision des statuts de l’hôtel-Dieu en septembre 1678, est à peu près semblable au précédent. Il paraît suivre un certain ordre : les baux sont abordés en premier, ensuite les sentences et arrêts, puis les titres et rentes, à la fin les comptes et les registres. Chaque cote (de 1 à 100) correspond à une pièce ou pièce principale (dans ce cas est précisé le nombre de pièces qui y est attaché). Pour chacune est indiqué l'objet par quelques lignes qui débutent par un mot-clé (terrier, bail, titre, sentence, arrêt, ...) répété en marge à gauche avec la cote. La date est indiquée en fin d'analyse. Quant au répertoire de 1770, il comporte des intitulés très brefs précédés de l'indication « liasse » ou du nombre de pièces. En regard de chaque intitulé se trouve la mention cote 1, cote 2, jusqu'à cote 163.
Entre-temps, la réalisation d’un nouvel inventaire est préconisée par de multiples délibérations du bureau : le 27 mars 1706, le 22 septembre 1725, le 1er août 1749… Mais pour être complet, cela nécessite de lever le plan de toutes les pièces de terre avoisinant chacune des propriétés de l’hôtel-Dieu... C’est une délibération prise le 7 mai 1782 qui a finalement lancé le travail. Deux hommes en sont chargés : le premier, Pierre Charles Gabriel Béville, est procureur fiscal du bailliage de Saint-Denis et administrateur de l’hôtel-Dieu. Le second, Etienne-Jean Guilbert, est notaire et greffier du bailliage de Saint-Denis. Secrétaire receveur de l’hôtel-Dieu du 5 août 1770 au 7 juin 1808, il connaît très bien les possessions de l’institution, ses dépenses et ses recettes. En 1778, volontaire, il avait déjà été chargé par la municipalité de Saint-Denis de rédiger un inventaire des archives de la ville. Une somme de 2 400 livres est allouée aux deux hommes pour toutes les opérations, plus les frais de voyage et les faux frais. Le 9 février 1790, le bureau confie aussi à Guilbert la réalisation pour 450 livres d’une expédition de l'inventaire avec la figure de chaque pièce de terre. Puis, le 16 mars 1790, Béville et Guilbert reçoivent 400 livres chacun pour les indemnités des travaux du cadastre. Le relevé et plan des propriétés de l’hôtel-Dieu est quant à lui réalisé par M. Garez, architecte de l'abbaye royale et de l’hôtel-Dieu (délibération du 7 septembre 1784) et Lamiral, un ingénieur qui fut payé 464 livres 18 sols (délibération du 2 mars 1790).
L’inventaire réalisé par Béville et Guilbert est composé de plusieurs parties. Il est introduit par un historique de l’hôtel-Dieu, suivi d'un bref exposé sur son administration et celle de ses composantes. Puis vient l'inventaire des titres et papiers, qui commence par un plan de classement/table des matières. Les séries y sont désignées par une lettre majuscule de l'alphabet, de A à AZ, et pour chacune d'elle est indiqué le nombre de liasses (par exemple, série E : Echanges ou acquisitions avant la réunion des maladreries faites en 1698. 10 liasses.). Après le plan de classement, suit le corps de l'inventaire où chaque série fait l'objet d'une analyse plus ou moins étoffée relative à chacune de ses liasses (en indiquant le nombre de pièces), voire à leurs pièces. Sur chaque pièce est portée une cote composée de trois éléments superposés : lettre de la série, numéro de la liasse, numéro de la pièce. Ce qui donne par exemple : cote (terme utilisé ici pour indiquer une série) Q, liasse 10, 2e pièce. Ou pour un registre : cote AM 3e registre. Après l'inventaire des titres et papiers vient l'inventaire des propriétés et revenus. Les 220 pièces de terre dont l’hôtel-Dieu est propriétaire sont classées selon qu’elles appartiennent à l’ancien domaine de l’hôtel-Dieu ou aux domaines des maladreries, et numérotées. Pour chacune d’elles, les renseignements et titres justificatifs de la propriété sont compilés de manière chronologique, avec leurs cotes à droite et, dans une des grosses de l'inventaire (cf. 15 S 80*), un plan en haut. Mais ces plans sont surtout rassemblés dans un grand registre où ils sont distribués par terroir et localisés par rapport aux propriétés voisines (dont on indique les propriétaires). Une table des numéros de plan indique la page à laquelle se trouvent le plan et la page de ce numéro dans les différents exemplaires de l'inventaire. Inversement, chaque exemplaire de l'inventaire est agrémenté de tables qui permettent d'établir le lien avec le plan terrier mais aussi entre chaque exemplaire. Enfin, à la suite de l'inventaire des biens, figurent les rentes que possède l’hôtel-Dieu, ses dépenses et charges, ainsi que l'inventaire des meubles et effets. Cet inventaire a été complété jusqu’aux années 1830 environ. Les séries se sont étoffées, et il a fallu en créer de nouvelles (jusqu'à ABG).
D’autres documents ont fait l’objet d’un inventaire à part comme, en 1764, les papiers de la fondation des filles à marier. Inventaire analytique pour les titres concernant la fondation et son homologation, il reste sommaire pour les autres pièces. En 1877, comme les autres archives de l’hôtel-Dieu provenant du chartrier de l’abbaye de Saint-Denis, les papiers de la fondation des filles à marier apparaissent dans le premier inventaire des archives communales antérieures à 1790 réalisé depuis la Révolution, signé Charles Bémont. Puis, au début du vingtième siècle, l’archiviste de Saint-Denis Frédéric Duval est l'auteur d'un nouvel inventaire, par échantillonnage. Publié en 1923, il n’utilise pas le plan de classement préconisé par la directive de 1854. Par ailleurs, il ne répertorie qu’une partie des archives inventoriées par Béville et Guilbert, mais en décrit d’autres qui n’apparaissaient pas dans cet ouvrage. Il recense des documents conservés aux Archives communales, mais aussi à l’hôpital-hospice et au bureau de bienfaisance. Dans ces deux derniers cas, leur lieu de conservation est indiqué entre crochets à la suite de chaque cote. Enfin, en 1986, un inventaire sommaire d’archives anciennes (hôtel-Dieu) et modernes (hôpital-hospice) réparties dans douze cartons est effectué.
En 1993, la nature et l'importance du fonds ont conduit à établir un inventaire analytique. Les archives inventoriées par Frédéric Duval avaient été mélangées, mais la plupart d'entre elles portaient leur cote GG (d'ailleurs sous deux écritures différentes, de deux époques). Par ailleurs, les archives de l’hôtel-Dieu étaient beaucoup plus nombreuses que celles décrites par Frédéric Duval, semblant indiquer que les documents avaient été dispersés. La première tâche a donc consisté à repérer, à l'aide des récolements de 1993, et à vérifier le contenu de tout ce qui était susceptible de contenir des archives de l’hôtel-Dieu. Plusieurs cartons entiers et quelques pièces ont pu être ainsi retrouvés. Certaines se trouvaient parmi des archives modernes, et étaient signalées dans le récolement : « pièce du XVIIe siècle » ou « pièce du XVIIIe siècle ». La plupart portait une cote de l'inventaire de 1790. D'autres n’ont pu être identifiées qu’une fois le fonds mieux connu. Dans un second temps, les archives de l’hôtel-Dieu, la série GG exceptée, ont été regroupées, alors que les archives communales déménageaient dans de nouveaux locaux. Le travail de classement s’est appuyé sur l’inventaire de 1790, qui prend en compte une grande partie du fonds et comporte de nombreuses séries dont les dossiers cohérents s'intègrent dans le cadre de classement des archives hospitalières. Or de nombreuses liasses avaient gardé leur ordre originel. Une fois le fonds de 1790 reconstitué, le travail d'analyse et de classement a été plus facile. Il a été plus long pour les pièces absentes des inventaires de 1790 et 1923, et celles dites « autres pièces ».
Quant aux fonds des maladreries, ils ont été distingués et "reconstitués" puisque les maladreries formaient des entités propres avant leur réunion avec l’hôtel-Dieu en 1698 et qu’ensuite, chacune possédait toujours son administration, ou du moins un administrateur nommé.