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La maison de répression, ci-devant dépôt de mendicité, de Saint-Denis

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Un "lieu infernal" pour réprimer la mendicité

Hôpital des pauvres mendiants, dépôt de mendicité, dépôt des pauvres, maison de secours, maison de répression (à partir du 27 avril 1802)… beaucoup de noms pour une même institution, installée à Saint-Denis pendant un peu plus d’un siècle. Créée suite à un arrêt du Conseil du roi pris le 21 octobre 1767, elle était destinée à recevoir les vagabonds, gens sans aveu et mendiants de tout le département de la Seine, voire au-delà (on y a notamment enfermé des mendiants arrêtés dans la région de Melun). Dans un premier temps, le dépôt des femmes et le dépôt des hommes se trouvaient dans deux paroisses différentes, Saint-Pierre et Saint-Rémy.

Au début de l’année 1769, hommes et femmes sont envoyés dans les bâtiments d’une ancienne manufacture de cuirs, situés au 92 de la rue de Paris (actuelle rue Gabriel Péri), à la confluence de deux rivières, le Croult et le Merdret. Le site comprend d’ailleurs un moulin, du moins jusqu’à la Révolution où ce dernier est racheté par l’industriel Rodolphe Ebinger, créateur d’une manufacture de toiles peintes à proximité. Mais ces rivières, qui reçoivent déchets et résidus de produits chimiques, sont l’une des causes de l’insalubrité du dépôt de mendicité, dénoncé comme un « lieu infernal »1 dès la fin du 18ème siècle. Et la situation ne fait qu’empirer au fil des années. En 1870, par exemple, après une visite de la maison de répression de Saint-Denis, l’écrivain Maxime Du Camp s’indigne2 : c’est « le plus immonde cloaque qui se puisse voir », où « les cours, pleines de poussière ou de fange selon la saison, n’[ont] même pas été pavées », et « où tout tombe en ruines ».

Les conditions de vie sont très difficiles. Les quartiers des hommes et des femmes sont séparés. La nourriture est rationnée. Dans la journée ? La plupart des individus enfermés sont employés dans des ateliers, à la filature de la laine notamment. Mais seule une partie du produit de leur travail leur revient. La nuit ? Ils s’entassent dans de grands dortoirs d’une centaine de lits où, « parfois, le nombre de détenus est tel qu’on est forcé de réunir deux lits côte à côte et de déposer un matelas au point de jonction, de sorte que trois personnes couchent dans un espace qui normalement devrait être réservé à une seule ». En effet, la population du dépôt (hommes, femmes, mais aussi quelques enfants) atteint souvent, voire dépasse, les 700 individus. Beaucoup tombent malades, et le nombre de décès est effrayant : entre 1768 et 1792, on enregistre pas moins de 6 329 sépultures à l’hôpital des pauvres mendiants, alors que le reste de la ville de Saint-Denis n’en dénombre que 3 696…

Après des années de tergiversations, de projets de déplacement avortés, la maison de répression ferme finalement ses portes en 1887. Les détenus sont transférés dans un nouveau dépôt, la maison de Nanterre, et les bâtiments démolis en 1890. Le terrain est alors racheté par la ville de Saint-Denis pour y construire la halle du marché et ouvrir trois nouvelles voies : les rues Auguste Blanqui, Jules Joffrin et Pierre Dupont. 

Comment retrouver la trace d'une personne qui a séjourné à la maison de répression ?

Aucun dossier de détenu ne semble avoir été conservé. En revanche, les Archives de la Préfecture de Police disposent des registres des mouvements de personne au dépôt de 1776 à 1887. Les Archives municipales de Saint-Denis détiennent quant à elles un registre d’écrou, qui a enregistré l'arrivée des mendiants détenus à Saint-Denis du 27 août 1785 au 13 fructidor an IV, et quelques listes ponctuelles des personnes enfermées. On peut aussi retrouver les personnes qui sont décédées à la maison de répression dans les registres paroissiaux et d’état civil.

Que consulter pour en savoir plus ?

Voici un petit guide des sources disponibles.

Notes

1 Dénonciation aux Etats-généraux du dépôt de mendicité établi à Saint-Denis-en-France, [s.l.], [s.d.], p.3.

2 Toutes les citations qui suivent sont extraites de l’article de Maxime Du Camp, La Mendicité à Paris. — Saint-Denis et Villers-Cotterêts, Revue des Deux Mondes, 2e période, tome 87, 1870, p. 175-212.