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Un message en arabe pour les travailleurs nord-africains – Avril 1947

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On peut lire, dans le Bulletin municipal de Saint-Denis du mois d’avril 1947 la phrase suivante :« La colonie nord-africaine de Saint-Denis étant très importante, nous avons penséadresser à ces travailleurs un appel en leur langue ».

Cette phrase introduit effectivement un texte imprimé en langue arabe non traduite (cliquer sur l’image pour le lire). C’est un mot d’amitié écrit et publié dans la presse officielle de la mairie. Il s’adresse aux Algériens de Saint-Denis qui sont arrivés par milliers depuis 1945, poussés à l’exil par la nécessité de trouver du travail. Nous sommes au temps de l’Algérie coloniale et les Algériens qui viennent s’installer à Saint-Denis sont « des Français musulmans d’Algérie », selon la terminologie administrative française.

Voilà une traduction de ce texte1 :

« A nos amis, fils de l’Afrique du Nord,

Le conseil municipal de la ville de Saint-Denis s’est intéressé, et s’intéresse toujours, à la situation des travailleurs africains habitant la ville. Il s’est occupé de l’amélioration de leur situation, en ce qui concerne leur logement dans des lieux décents et salubres. Le conseil fait tous ses efforts pour faire bénéficier les Africains des mêmes lois sociales et droits politiques dont jouissent leurs frères français. Le camarade Gillot, maire de la ville, a demandé au préfet du département de la Seine que la caserne – occupée par les prisonniers allemands – revienne aux travailleurs nord-africains. Il a demandé également la création d’écoles de formation professionnelle pour ces travailleurs, ainsi que des cours du soir pour ceux d’entre eux qui sont analphabètes. Voilà, entre autres, ce que le conseil municipal a fait pour vous. Il ne fait pas de doute que ces demandes aboutiront bientôt et que vous verrez votre situation s’améliorer petit à petit ».

Dans le même temps, Auguste Gillot, qui est aussi conseiller général, demande au Conseil général de la Seine de ratifier une résolution prise par les Nord-Africains de Saint-Denis. Il ne parle pas « à la place » ou « au nom » des Nord-Africains mais leur donne directement la parole.

Voilà le texte de la résolution relayée par Auguste Gillot en séance du Conseil général :

« Elle demande le paiement des allocations familiales, par mandat direct, sans passer par les caisses algériennes, et le bénéfice des allocations familiales au profit des travailleurs marocains et chômeurs. Elle demande la construction de logements aux frais des employeurs et des pouvoirs publics, l'ouverture de centres de formation professionnelle accélérée, l'application des lois sociales et de la Sécurité sociale en Algérie, l'embauche des ouvriers nord-africains au chômage et l'inscription sur les listes de chômage, sans aucune formalité, des travailleurs nord-africains sans emploi. Enfin, elle demande – vous réfléchirez pourquoi – la libération des victimes de la répression colonialiste et l'amnistie pour les mineurs condamnés d'Afrique du Nord pour faits de grève ».

Ces textes méritent qu’on s’y arrête. Il n’y a pas d’attitude coloniale ou condescendante chez Auguste Gillot. Il n’y a pas de crainte non plus. Il est élu pour représenter les habitants. Il est proche des intérêts de la condition ouvrière. Les Nord-Africains sont des habitants et des ouvriers. Il les représente comme tous les autres habitants et ouvriers.

 

(1) Traduction effectuée par les soins de Guillem Figueras Moreu (Adil Elamrati et Marie Vannetzel) pour son mémoire Les communistes dionysiens face à l'immigration algérienne (1945-1956).

 

Ce focus est publié dans le cadre de l’anniversaire de l’Indépendance de l’Algérie. Voir aussi :

Focus publié le 02/07/2012.