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Pour la paix en Algérie – 1961

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Nous sommes à Saint-Denis pendant la Guerre d’Algérie, le 21 mars 1961. Il fait beau. Il y a du soleil sur les pavés.

La scène se passe sûrement à l’heure du repas de midi car des hommes ont le pain de leur casse-croûte à la main et leur musette à l’épaule. C’est une prise de parole syndicale ou politique, dans la rue, devant la porte d’une usine.

Quelle est la rue ? Rien ne le dit mais c’est sûrement une rue d’usines. En face, un camion décharge des fûts de graisse industrielle. En haut de la photographie, à droite, on distingue un panneau comme on n’en voit plus aujourd’hui. C’est une locomotive à vapeur dans un triangle. Attention danger ! Il faut ralentir. Un train peut surgir sans crier gare. Dans cette rue, les trains traversent comme les piétons. Les usines sont toutes reliées au rail.

Quelle est cette usine devant laquelle des hommes et des femmes se sont attroupés ? Un autre panneau, en haut et à gauche cette fois-ci, indique l’embauche du jour. On recherche des serruriers. Serrurier, c’est un métier de la petite métallurgie. Alors, nous sommes sans doute devant une usine de construction métallique ou d’équipement mécanique, comme il y en a tant à Saint-Denis, à cette époque-là.

La comparaison de cette photographie avec une autre, prise le même jour, et qui a été légendée par son photographe, nous donne la solution. On y reconnaît le visage de deux ouvrières. Nous sommes devant l’usine de la Compagnie internationale des Wagons-Lits, au 110 de l’ancienne rue de la Gare, renommée rue Ambroise Croizat après la Seconde Guerre mondiale. Dans la même rue, au 112, il y a l’usine Christofle, au 164, Biro Fils, au 120, Améliorair, au 114, Citroën, dans les locaux de l’ancienne Compagnie générale de construction. Nous sommes bien dans une rue industrielle d’usines métallurgiques.

Ces hommes et ces femmes qui écoutent un de leurs délégués parler contre la Guerre d’Algérie ne sont pas très nombreux. Il faut bien le reconnaître. Mais ils sont là en bleus de travail pour les hommes, en blouses pour les femmes. C’est la pause de l’heure du repas et il sont tous volontairement sortis « dehors » car les réunions politiques ou syndicales sont interdites dans l’enceinte de l’usine. Il faudra attendre 1968 pour que cela change.

Plusieurs ont un papier à la main. La prise de parole s’est accompagnée d’une distribution de tracts. Il y en a qui portent un béret, d’autres une casquette. Mais la plupart ont la tête nue. Le temps des chapeaux est un peu passé. Les musettes sont en toile caoutchoutée avec un cordon de serrage en coton. A cette époque, les enfants ont les mêmes, en plus petit, pour le goûter de quatre heures après l’école.

Un homme, à droite, attire le regard. Il est coiffé d’un chapeau mou, type Borsalino, et il est en veste de tweed à carreaux. Il quitte la scène de la prise de parole. Son visage est légèrement baissé, un peu dans l’ombre. A la main, il porte un appareil photo. Un journaliste ? Un policier en repérage ?

Cette photo retient longtemps l’attention. Elle dit toute une époque dans une ville ouvrière où vivent et travaillent des milliers d’Algériens.

 

Focus publié dans le cadre de l’anniversaire de l’Indépendance de l’Algérie. Voir aussi :

Focus publié le 11/05/2012.